Les Nanas de Niki de Saint Phalle

Elles sont grosses, elles sont imposantes, elles sont colorées et joyeuses. Ce sont d’énormes poupées qui rappellent la femme moderne, réalisées par l’artiste peintre, sculptrice et plasticienne: Niki de Saint Phalle.

Les œuvres de cette artiste ont marqué le milieu du XXe siècle. Parmi les plus célèbres figurent les Tirs. Il s’agit d’une performance consistant à tirer à la carabine sur des tissus remplis de peinture, qui giclent pour créer des formes éclaboussées.

Les Nanas, par ailleurs, ont propulsé l’artiste sur le devant de la scène internationale. Ce sont des sculptures immenses faisant partie du groupe des Nouveaux Réalistes.

D’abord inspirée par la grossesse de son amie, Niki de Saint Phalle crée la première sculpture de cette série montrant une femme enceinte. Elle en fait ensuite une série de femmes aux formes extravagantes.

Ces sculptures mettent en valeur la silhouette féminine avec ses rondeurs, ses défauts et toutes ses formes proéminentes, en particulier celles de la poitrine et des fesses.

Elles sont en majorité réalisées avec du polyester peint de couleurs très fortes et voyantes, histoire de provoquer l’image de l’exubérance de la féminité.

D’ailleurs Niki de Saint Phalle débute les Nanas en 1960 pour incarner la féminité. Cette action est une mise en valeur du soutien de l’artiste pour le mouvement féministe.

Les corps de ces femmes qu’elle célèbre dans ses sculptures sont recouverts d’ornements, de couleurs vives, les poitrines sont généreuses, les hanches sont bien larges, les poses sont festives. Ces femmes sont heureuses, elles dansent et sont complètement décomplexées.

L’énergie que ces sculptures dégagent est joyeuse. La femme est célébrée avec ses défauts, ses imperfections et tout son charme à l’état cru.

Cependant, vers la fin des années 60 et le début des années 70, les critiques d’art masculins commencent à ressentir un malaise. Certains écrivent que si les Nanas dansent et font la fête, c’est aux dépens des hommes.

Pourtant ces sculptures continuent d’étonner et d’intéresser le public.

La plus grande des Nanas, également la plus éphémère, prénommée “Hon” (Elle), présentée au Moderna Museet de Stockholm en 1966, est une Nana géante couchée, jambes écartées que l’on visite en entrant par son sexe.
On y découvre alors quantité d’objets créés par l’artiste. Cette énorme sculpture a été détruite après l’exposition. Il aura fallu trois jours pour la démanteler. Mais on en garde des photos de femmes, hommes et enfants entrant dans la gigantesque ouverture vaginale.

Cette statue monumentale est l’allégorie du corps de la femme. Elle comprend en elle d’autres œuvres et installations de l’artiste et de son mari, Jean Tinguely.

L’exposition comprenant cette sculpture abrite un “milk-bar” dans le sein droit et un planétarium dans le sein gauche, un cerveau en bois, un “banc des amoureux”, un distributeur de sandwichs, diverses sculptures et un vide-ordure.

Hon, ou la célébration du corps de la femme, invite les visiteurs à y faire un voyage d’introspection. Niki retourne la représentation de la femme comme objet sexuel, faite par Salvador Dalí, en forçant l’homme à rentrer dans le corridor de la naissance et à affronter l’horreur secrète de l’anatomie de la femme.

“Je compris très tôt que les hommes avaient le pouvoir, et ce pouvoir, je le voulais. Oui, je leur volerais le feu. Je n’accepterais pas les limites que ma mère tentait d’imposer à ma vie parce que j’étais une femme”, écrivait Niki.

Ses sculptures continuent à intriguer et à susciter curiosité et réflexion. On peut les admirer dans de nombreux pays à travers le monde. Elles sont intemporelles.

Original article at icibeyrouth.com

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