“Cocktail maison”: Une pièce de théâtre au piment fort

Un cocktail concocté au vitriol, avec un arrière-goût de crabe pourri et au savoureux croquant de cafard; un barman hilare et bizarre, des clients en manque d’amour, des chansons qui dansent, des mots qui chantent pour faire rire et sourire; en somme, une comédie noire dans un décor en couleurs.

Signée Walid Yazigi et mise en scène par Bruno Tabbal, cette exquise comédie noire, jouée avec brio par Cynthia Karam, Maria Douaihy, Joseph Açaf, Patrick Chemali et Bruno Tabbal, au théâtre Montaigne cette semaine et au théâtre Monnot la semaine prochaine, est tout simplement une happy hour, diluée de fous rires baignés de fins jeux de mots, où certains “walaw” ou autres “inchallah” exclamatifs typiques de notre dialecte libanais, viennent rejaillir pour asperger le cocktail d’un jus cocasse.

Un barman à la silhouette provocatrice et étrange sert de confident à des clients qui viennent attendre leurs rendez-vous anonymes pris sur des sites de rencontres sur la toile. Dans son bar de nuit, il leur sert son cocktail fait maison, dont la recette reste mystérieuse.

Tout au long de la pièce, défilent des protagonistes aux allures absurdes, entre la jeune femme en manque d’affection en sweat-shirt XXL et aux bas en toiles d’araignée; l’esthéticienne provocatrice, exclusivement pour blondes; le désopilant policier qui a perdu son chien; le jeune homme désespéré… tout ce beau monde se délecte d’un cocktail au goût rehaussé d’un énigmatique je-ne-sais-quoi.

Il y a couleurs et chansons, obscurités et illusions. On se perd entre une perruque blonde et une conversation inachevée. On se demande “où est passé Mirza”, on a envie de goûter à ce liquide orangeâtre, on ne comprend pas vraiment qui est Mélanie, Mélène ou Gwendoline, on admire le jeu des acteurs et on glisse dans la noirceur d’une pièce comique.

Une happy hour comme on n’en a plus passé depuis longtemps à Beyrouth (en passant par Dekwaneh) où l’on s’abreuve et l’on rigole dans un délire liquide et théâtrale, qui se termine avec un clin d’œil Hitchkockien au film Psycho (1860).

Entre la blondasse interprétée par l’extraordinaire Cynthia Karam, la délicate âme esseulée qui réussit si bien à toucher le public jouée par Maria Douaihy, l’incroyablement comique Joseph Açaf, le charmeur désespéré que Patrick Chemali interprète entre deux siestes, et l’unique Bruno Tabbal qui met non seulement en scène cette pièce, mais qui y met de son âme, en ouvrant le spectacle, postérieur en avant-scène et cheveux frisés (pour mieux boucler la boucle)… le cocktail n’en finit pas de nous saouler!

Allez voir cette pièce, elle en vaut l’empoisonnement au vitriol!

Original article at icibeyrouth.com

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